On dit assez souvent ici, ce qu’on pense comme n’étant pas acceptable dans les premiers travaux Macron, quelquefois, allant même jusqu’à poser de bien mauvaises notes dans la marge de ses copies. Alors, quand se présente un rapport destiné à l’exécutif, signé d’une plume qui tient la route, celle d’Eric Orsenna, en équipe avec Noël Corbin, inspecteur général des affaires culturelles, et sur le sujet des bibliothèques, on lui prête un œil attentif, et dans l’affaire, bienveillant. Le travail, aboutissement d’un tour de France de 3 mois des lieux de lecture publique, a bâti un solide rapport, étayé, réfléchi, suffisamment rare pour qu’on le souligne.
Rapport – que va lire qui de droit, et sa ministre de la culture, concernée pour le moins par le livre, puisque directrice dans une autre vie de la belle maison Actes Sud.
Rapport, et non bien entendu, loi ni même décret. Simple déclinaison de situation, problèmes, modalités possibles d’améliorations, voire de réparations, et, en l’état du sujet, en gardant la métaphore architecturale, d’un vaste plan de rénovation – avant, après. Rapport, diront certains, donc, la voie la plus sûre pour la poubelle et l’élimination de la chose observée ? Ici, cela ne sera probablement pas ; les méthodes Macron – pour le moment, reconnaissons leur cette qualité – n’enterrent pas ; elles regardent avec attention et pèsent, puis acceptent une partie notable et négocient le reste ; Jupiter, on le suppose sans peine, en même temps que le sujet de la dissertation, ayant fourni les grandes lignes de « son » plan… Le titre apporté par l’enthousiasme et les compétences d’Orsenna est beau : « Voyage au pays des bibliothèques ; lire aujourd’hui, lire demain ».
Il s’agit donc du monde des bibliothèques – le jeune président via sa grand-mère ouvreuse de livres en son enfance, ne peut qu’avoir porté à l’affaire l’œil bleu le plus attentif, si ce n’est tendre. Macron et le livre, une belle évidence politique, que depuis Mitterrand, on avait, disons-le, trop peu fréquentée.
Bibliothèque, en pays de France : une par commune même petite, une par quartier, sensible ou moins, c’est la musique des territoires qu’on entend là.
Salle souvent peu éclairée, rayonnages – qui ose dire, poussiéreux ? silence des pages tournées en salle de lecture d’où ne sortent pas les ouvrages (voyez le règlement), pas de loups en bordure des gondoles dont on extrait celui-ci et – tiens, pourquoi pas celui-là. Chuchotements, préposé encore en blouse grise ou dame se penchant sans miette de mot, sur le listing informatisé depuis si peu. Vous, votre carte écornée par tant d’années d’abonnement, et le jour des scolaires, enfin le bruit, enfin la vie, avec quelquefois, un animateur présentant des contes… On a beau dire ou rire, il y a encore beaucoup de ça dans les maisons des livres actuelles.