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« Le crapaud, tribune libre ! »

Notre ami et rédacteur Jean François Joubert nous donne cette semaine, un texte particulièrement fort, dont nous le remercions. Qu’à cette occasion, il soit rappelé les contributions souvent de toute première importance, à la création, de ces esprits agencés autrement, que sont les malades psychiques. Et, ceci, dans tous les domaines : écritures, peinture, sculpture et tous les arts graphiques ; musique, bien évidemment ! La Rédaction de Reflets du Temps   L’égalité du drapeau dans le handicap psy ! Bleu, blanc, rouge sang de France, deux rapatriements « sanitaires » au compteur, un aux Antilles, un au Portugal. Merci ! Fiché, épinglé, pas de moyens financiers autres que les 790 Euros de mon allocation, condamné à être pauvre, au fond du trou. L’avenir ? La vieillesse ? Le droit au minimum social ! L’avenir, sombre ! Né sain, la maladie arrive comme un cheveu sur le hamburger, je suis mangé au quotidien par mes angoisses, aussi sensible qu’un ordinateur qui bug. Se laver, communiquer, sortir du mode parano, est une mission impossible, non, je ne suis pas normal au sens commun du terme !   Vous ne me voulez pas de mal, alors osez entrer dans mes divagations :   …En colère, nu, je rentre dans la maison, je me couvre. Juste avant, comme si j’avais eu une réponse du Tout Puissant, j’ai senti comme une aiguille entrer dans mon pouce, et puis, la terre tressauter tandis que la nuit peinait à chasser ses étoiles, comme si le temps s’était suspendu. Un passant… je l’agressai presque. Il est témoin involontaire de ce coup d’éclat, de la nuit retenue, de cette nuit qui refusait de laisser l’aube entrer. À cet instant, j’étais si sensible que je ressentis la rotation de la terre. Je venais d’entrer ailleurs… dans un monde de folie. Une crise paranoïaque, une crise spirituelle, une crise contre le monde, contre tout le monde. Même à l’abri dans la maison, la douleur est tellement forte qu’il m’est impossible de dormir. Alors je me couvre le corps d’une toge, la couverture du canapé, et je pars sur la route. Je marche. Je marche, la vie s’éveille, et je croise du monde qui rigole… tout le monde se moque de ma désespérance. Alors je décide d’ôter ma cape, le drap tombe à terre, et j’avance nu… les gendarmes arrivent, ils m’arrêtent, me couvrent, me posent des questions… et je me retrouve pour la première fois de ma vie à l’hôpital psychiatrique. Marigot, ville de mon errance psychique… je crois en une conspiration, je crois que l’on croit que je suis homosexuel, je crois… Rien ! En fait, j’ai juste mal. Je suis enfermé dans un institut, calme, j’ai une chambre, on me nourrit, et je ne sais pas ce que je fais là. Bien sûr, il y a eu cette crise de nerfs, cette crise de démence… et puis je voudrais la revoir, lui dire « Je t’aime », lui dire « Ne me quitte pas », et je joue avec un compagnon de voyage aux échecs, rare visite. Un piège. Je suis hors de moi ! Je souffre et je crois qu’une ex m’a tendu un piège mais pourquoi ? Et qui ? Je déraille, refais ma vie, de tout petit à maintenant, et je craque encore, ou était-ce avant ? Je me souviens jeter mon poing dans une vitre. J’ai mal. Je saigne. Je suis ouvert… c’était avant le tourbillon, avant d’exploser, avant de me retrouver au centre de mes angoisses ; toujours piégé par ma propre personnalité. Celle d’un loup solitaire, devenu solitaire, la mer – mère est loin de mes yeux, maintenant. Mon handicap – la schizophrénie, une psychose – mes devoirs, la camisole chimique, mes droits, me taire, surtout me taire ! Actuellement, je me protège de ma propre flatterie, euh, de mes frères et sœurs qui ne veulent pas savoir ce que c’est ce mot travesti par les journaux, je chasse le bonheur au creux, au cri de mes insomnies, de ma nudité d’âme. Je vole vers votre bon sens  – les « valides ». Pourquoi vous ne nous acceptez pas dans notre différence de fous ? Folie douce ou l’autre, démence, vous avez peur de nous les handicapés « psy » ; qui sommes-nous à votre regard ? Demeuré, oui, peut-être ! Quand vous voyez un handicapé moteur, vous reconnaissez son Handicap, quand vous me voyez, vous changez de trottoir, non, je ne suis pas une merde ; je risque juste ma peau, mon foie, ma foi, tous les jours ; je souffre, ma pensée m’isole, me désole, ; je suis sincère et je m’exclame : pourquoi, oui, pourquoi le Handicapé psychique ne connaît que ses devoirs et jamais ses droits ? « Valides », je vous les demande ! Blanc, pas la couleur de ma peau, celle de mon handicap. Ma douleur est réelle, pas feinte, et je demande d’être entendu, pas écouté, juste des mots pour cette valeur commune : l’égalité ! La seconde chance du drapeau de notre Pays, et ce droit de l’Homme ! Juste l’égalité, rien de plus, rien de moins non plus !   Dans Reflets du Temps, lire également : «  Gérard Garouste … » Martine L Petauton https://www.refletsdutemps.fr/index.php/thematiques/culture/arts-graphiques/item/gerard-garouste-ma-decouverte-2011   Et : «  vous avez dit Bipolaire…  » Martine L Petauton https://www.refletsdutemps.fr/index.php/thematiques/actualite/societe/item/vous-avez-dit-bipolaire

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