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Racines d’actu : Les « affaires » Jean Zay

On se souvient que tout récemment les cendres de Jean Zay ont été transférées au Panthéon. La décision fut prise par François Hollande le 21 février 2014 et la cérémonie eut lieu le 27 mai. On se rappelle aussi de la polémique lancée à cette occasion par l’extrême-droite française – concernant le soi-disant « antipatriotisme » de ce grand ministre radical-socialiste de la fin de la IIIe République ! Enfin, nous ne sommes actuellement qu’à une semaine de la commémoration du terrible assassinat dont il fut la victime en ce jour horrible du 20 juin 1944… Je vais donc revenir ici sur les différents aspects des « affaires » Jean Zay, et avant tout, bien sûr, en ce qui concerne le contexte et les méthodes employées pour l’assassiner lâchement… ! La première affaire est celle de la polémique déchaînée par l’extrême-droite contre celui – avocat et homme politique de gauche – qui fut l’ancien ministre visionnaire de l’Éducation nationale du Front Populaire (et même au-delà, jusqu’en septembre 1939) et député du Loiret. Un peu comme pour Roger Salengro (accusé de « désertion face à l’ennemi » pendant la Guerre de 14), Jean Zay eut à subir une campagne de dénigrement concernant son « pacifisme antipatriotique » ; tout cela parce qu’il avait rédigé dans sa jeunesse un poème ( Le drapeau ) ayant une teneur hostile à ce qu’avait été « la Grande Guerre ». Deux points importants à ce sujet : fut-il le seul à avoir été ainsi traumatisé par cette « boucherie nationaliste » ? Fut-il le seul à avoir des réactions « pacifistes » ? Doit-on considérer le « pacifisme » de cette époque-là comme une trahison « antipatriote » ou bien plutôt simplement comme une réaction normale par rapport à ce qui s’était passé dans les tranchées ?! De toute façon, c’est tout de même fort d’entendre les héritiers de ceux qui acceptèrent de se coucher devant Hitler et de collaborer avec l’Allemagne nazie accuser cet homme d’antipatriotisme, lui qui, justement, fut – par la suite – un anti-munichois notoire ! La vérité, c’est que ce que l’extrême-droite française de l’époque (et encore de nos jours, dans ses strates archéologiques) reprochait à Jean Zay, c’était d’être « un juif » ; donc, pas vraiment « Français »… ! D’ailleurs, il fut victime par la suite d’une très violente campagne antisémite, dans ces moments où les nationalistes faisaient leurs choux gras de « l’idéologie antisémite » ! De nombreux leaders d’extrême-droite s’étaient ainsi lancés contre lui. Pour la seconde affaire, c’est-à-dire celle des conditions et la façon dont Jean Zay fut éliminé, le récit qui doit être fait apparaît comme plutôt terrifiant ! Ce sont en effet des miliciens au service des basses besognes du régime de Vichy (« L’État Français de Pétain »), et en liaison directe avec des hommes de Joseph Darnand, qui le massacrèrent au lieu-dit Les Malavaux, dans la faille du Puy du diable à Molles (dans l’Allier). Les assassins traitèrent son corps (avec des grenades et en jetant sa dépouille dans une crevasse… !) d’une manière ignominieuse, tellement chargée de haine… ! Ce n’est que vers la fin du mois de septembre 1946 que son corps fut retrouvé et enterré, sur ordre de la municipalité de Cusset (près de Vichy)… Jean Zay avait été mis en prison militaire près de Clermont-Ferrand, dès août 1940, sur ordre du régime de Vichy, avec une accélération scandaleuse de la campagne antisémite qu’il avait déjà commencé de subir auparavant (comme cela a déjà été dit). Philippe Henriot, le trop célèbre ministre de l’information des vichystes, réclama très tôt la condamnation à mort du « juif Jean Zay », comme juif, franc-maçon, anti-munichois, anti-hitlérien et ministre du Front Populaire… A propos des accusations « d’antipatriotisme », le 5 juillet 1945 la cour d’appel de Riom (ville située près de Clermont-Ferrand) réexamina les faits reprochés au sous-lieutenant Jean Zay, et constata qu’à aucun moment il ne s’était soustrait à l’autorité militaire, et que « les poursuites intentées contre /lui/ ne peuvent s’expliquer que par le désir qu’a eu le gouvernement /de Vichy/ d’atteindre un parlementaire dont les opinions politiques lui étaient opposées et qu’il importait de discréditer en raison de la haute autorité attachée à sa personnalité ». Elle annula donc le jugement du 4 octobre 1940, Jean Zay étant alors pleinement réhabilité à titre posthume.   Jean Zay, un républicain , François Marlin, Infimes Éditions, 2015, 208 pages Jean Zay, le ministre assassiné 1904-1944 , Antoine Prost et Pascal Ory, Tallandier, 2015, 160 pages

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