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Shimon Peres : vis pacem, para bellum

Shimon Peres est probablement le plus populaire de tous les hommes politiques israéliens, à l’intérieur comme à l’extérieur, voire jusque chez les Palestiniens. Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, a tenu à assister personnellement à ses obsèques. Il restera, bien sûr, comme une colombe : prix Nobel de la paix 1994, initiateur avec Yitzhak Rabin des accords d’Oslo, artisan la même année du traité de paix avec la Jordanie, fondateur en 1996 du Centre Peres pour la paix. La paix, toujours la paix donc. Mais si Peres était pacifique, il n’était en rien pacifiste. En tant qu’adjoint au ministre de la défense, il fut le père de l’arme atomique israélienne, maître d’œuvre du projet « Dimona », qui le vit négocier, au nom d’Israël, à Sèvres, dans la banlieue parisienne, la livraison d’un réacteur nucléaire civil ; lequel permit la fission d’uranium et de plutonium, indispensable à la fabrication de la bombe. Sur le plan militaire, il coordonna en 1956 la riposte franco-anglo-israélienne à l’occupation par Nasser du canal de Suez ; et en 1996, il fut, cette fois en qualité de premier ministre, à l’origine d’une guerre – baptisée « opération raisins de la colère » – contre le Hezbollah libanais, en réponse au bombardement par celui-ci du nord du pays, au moyen de roquettes de type Katioucha. Devenu président, Peres, bien que n’ayant plus qu’un rôle représentatif, approuva l’offensive « plomb durci » contre la bande de Gaza, dont le coût matériel et humain fut considérable. « Nous ne comprenions pas, expliqua-t-il dans un discours devant l’Agence Juive à Jérusalem, et nous ne comprenons pas encore maintenant, pourquoi, après avoir évacué Gaza, ses dirigeants commencèrent à tirer des milliers de missiles contre nos civils. Pour quelle raison ? Dans quel but ? ». Parallèlement, Peres soutint le – très controversé – blocus de Gaza : « Israël lèverait le blocus, affirma-t-il, si le Hamas montrait quelque intérêt à faire la paix ». D’où l’épitaphe, mi-figue, mi-raisin, que lui réserva le quotidien de gauche Haaretz : « si Israël se trouve au bord d’un abyme moral, peut-on lire dans son numéro du 28 septembre, Peres y a sa part. Si c’est un pays en route vers l’apartheid, il en fut le co-fondateur ». Jugement sévère. Peres était avant tout un réaliste, conscient de ce qu’un compromis est très difficile avec les leaders palestiniens actuels, en particulier ceux du Hamas, et plus difficile encore avec l’allié du Hamas, via le Hezbollah : l’Iran. Ainsi qu’il l’écrit lui-même dans ses mémoires : « La paix ressemble beaucoup à l’amour. C’est un processus romantique. Il faut y vivre, il faut s’y investir, il faut y croire. De même qu’on ne peut imposer l’amour, de même, on ne peut imposer la paix ». Si tu veux la paix, prépare la guerre. Oui, M. Peres, vous avez eu raison.

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