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Arctique : Une exploration stratégique – Revue de Politique étrangère de l’IFRI

Dans son numéro d’automne, la revue de PE de l’IFRI nous emmène en deux endroits du monde, à la fois connus de chacun d’entre nous, mais souvent embarrassés de représentations fantasques ou incomplètes. L’Arctique d’abord, qui fera l’objet de cette recension, mais aussi L’Arabie Saoudite en question qui nourrit deux articles passionnants et complémentaires de la rubrique Contre champs (ainsi de celui intitulé « Arabie Saoudite, faux ami ou vrai ennemi ? »). En dehors de l’introduction, «  Les dynamiques géopolitiques de l’Arctique  », pas moins de trois forts articles nous emmènent là-haut, dans les glaces qui fondent, où les appétits se déchaînent, et où, probablement pourront se jouer, demain, quelques cartes maîtresses d’importance du monde à venir. L’introduction le pose d’emblée sur la table : « Les dynamiques s’inscrivent à la fois dans un contexte régional caractérisé par des revendications territoriales, et dans un contexte global marqué par des tensions accrues entre Russie et Occident » . «  Comprendre les rivalités arctiques  »   revient utilement sur un espace qui fut stratégique durant le dernier conflit mondial, ainsi que pendant la guerre froide, pour ensuite s’assoupir. Territoires – 15% de la planète pour 4 millions d’habitants – qui actuellement concentrent bien des regards, tant inquiets (marqueur terriblement spectaculaire du réchauffement climatique) que concupiscents ; réserves considérables en matières premières et sources d’énergie, mais aussi route nouvelle Est/Ouest, rendue possible dans des eaux devenues plus navigables, sans oublier l’usage des mers, la pêche, et l’extension des plateaux continentaux. Tout étant en partie lié – d’un mal, un bien ? – à la fonte des glaces. Les états de l’Arctique (Russie, Canada, USA, Islande, Danemark, Norvège, Suède, Finlande) sont tous membres de l’OTAN sauf évidemment la Russie. On saisit donc la portée stratégique de la zone dans la géopolitique actuelle, d’autant que passent le nez à la fenêtre, la Chine, ou l’UE, intéressés au plus haut point, bien qu’extérieurs. Immenses anciens « déserts blancs », à la gouvernance particulière, ce que montre le second article «  Le conseil de l’Arctique, la force des liens faibles  ». Créé en 1996, ce conseil s’est d’emblée positionné en « soft law » ; le dialogue, la mise en place de projets de coopérations, notamment scientifiques, étant le mode choisi de fonctionnement. Une forte dépolitisation caractérisait les débats, considérant comme extérieurs à leurs pouvoirs toute position de médiation ou de prise en mains des conflits. Le sujet pressant du changement climatique et de ses diverses implications bien au-delà des frontières de la zone arctique, exige depuis peu un fonctionnement – et des institutions – moins « soft ». Des états observateurs (dont la France depuis 2000) participent dorénavant au conseil ; les ordres du jour se penchent sur des revendications de peuples autochtones, la délimitation des lignes côtières, la souveraineté au-delà des zones économiques exclusives. Même si la construction institutionnelle impose encore à ce jour une gouvernance non coercitive, se tenant fortement éloignée des problématiques militaires, le climat général change, et le conseil évolue, piloté par faits et demandes même extérieurs à la zone. C’est le membre le plus vaste, puissant et vu comme agressif, des états, qui, dans le contexte actuel, impose des changements, voire des aménagements et perspectives nouvelles : la Russie à laquelle est consacré le dernier article : «  Les objectifs stratégiques de la Russie dans l’Arctique  ». L’intérêt de la Russie pour cette zone s’est beaucoup développé dans la dernière décennie : convoitant l’exploitation à haut niveau des richesses en minéraux, pétrole, gaz (ce qui ne serait du reste pas sans difficultés ni coût), escomptant l’utilisation de la route maritime du nord (que faciliterait encore sa flotte de brise-glace), «  L’Arctique est perçu comme garant du développement futur du pays, et de la position internationale de la Russie comme fournisseur incontournable d’énergie  ». Bien plus, les intérêts militaires priment dans l’affaire, dans ce pays qui veut développer partout l’image martiale de la grande puissance qu’elle veut redevenir. Modernisation militaire de l’Arctique – domaine maritime et aérien, et rôle central dans la dissuasion nucléaire ; voici les fers au feu actuels. Plusieurs sous-marins lance-missile sont construits, et une infrastructure complète de défense côtière de l’Arctique est en marche. Rien, cependant, de très menaçant – rien, encore – car, la Russie, nous dit l’auteur de l’article, «  a tout intérêt à coopérer avec les autres états arctiques pour maintenir une stabilité globale  » de la zone et pouvoir lancer et développer les programmes économiques garants des installations militaires en cours et projets.   Revue de politique étrangère de l’IFRI, Automne 2017, 23 €

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