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Et si vous restiez, Madame… Taubira et la cordée

…Si vous ne quittiez pas l’arène, comme l’ont fait, pfft ! ces Filippetti – si peu présente, c’est vrai – Montebourg, malgré son panache et sa grande gueule, Duflot, pliant son courage, à moins que son ambition. Qui, encore ? Hamon, parti à la veille de la rentrée ; de ce pitoyable-là, on ne dépensera pas un mot triste de plus. J’en oublie peut-être. J’en oublie sûrement ; notre Vème république tellement monarchique en a fait d’autres… Mais, vous, dont il se dit – dont vous dites ; n’étant pas du genre à laisser faire le boulot dans la coulisse murmurante et ragoteuse – que, si le gouvernement dont vous êtes, persiste à oublier le calendrier concernant la loi encadrant les peines des mineurs délinquants, et s’attaquant au dispositif datant de 1945 (prévu 1er semestre 2015 ; or, vous savez compter), eh bien, vous « n’assumerez plus ». Haussant le col devant le journaliste médusé, ou, appâté : – Vous démissionneriez ? – Vous le verrez en temps utile… Et votre voix au son unique et presque racinien de ponctuer là, l’entretien. A Reflets du Temps, madame, plusieurs chroniques ont dit l’estime qu’on porte à votre force, votre façon de pratiquer la citoyenneté, de hisser haut les valeurs de la République, de notre République. L’une d’entre elles titrait du reste « Taubira, la République ». Pas une virgule n’en est à changer, à ce jour. Alors, d’où viendrait le malaise ? La goutte de trop sortirait de quelle carafe ? De celle de notre Premier ministre, probablement, avec qui, vous chahutez, maligne, devant les caméras, mais dont on sait les considérables fleuves qui vous séparent, vous, la Gauche des « vieilles » valeurs idéologiques en bandoulière fière ; lui, la Gauche « moderne » qui avance à grands pas nerveux, fouaillant au passage jusqu’au nom de Socialisme. Dans son ombre, Macron et sa jeune arrogance. Le jeune surtout, oui, vous l’avez peut-être assez vu, et je ne sais quelle formule langagière utilisait votre grand-mère en Guyane, mais je sens qu’elle est cousine de celle de ma grand-mère à moi, Berrichonne grand teint : « me sort par les trous de nez, çui-là ! » Car, il ne suffira pas à Manuel, l’infatigable capitaine, de désigner l’important pour le citoyen, en termes uniques de boulot, de formation pour les enfants, en semblant oublier, ou tenir dans l’ombre, ou garder pour plus tard, le reste, les valeurs, les principes, et dans ceux-ci, la justice voulant (accessoire ? vraiment) que l’éducatif joue un rôle primordial dans l’encadrement des délinquants mineurs. Qui a dit, Gauche ? Or le calendrier, notamment, l’entrée dans l’été porteuse de vacuité et de désordre en terrain jeune, sans boulot, ni avenir net, n’est pas à négliger… le temps presse, vous le dites et il faut pousser les feux. Là, bien entendu, vous répond-on, mais là, et là, aussi, et pas moins légitimement… En politique, aussi, l’ordre, prime, même à gauche. Et ce pourrait bien être de ces devant, derrière, d’abord, après, qu’il s’agisse. Certes, mais la bataille semble bien être sur un autre terrain, plus vaste, plus politique : à pousser, Sisyphe obstiné, la boule droits et égalité, au nom du Père Hugo, qui ne rougirait pas de votre verbe, sur ces chemins louvoyants, culottés, de Social libéralisme bondissant, on peut comprendre votre… fatigue ? mais connaissez-vous seulement ce mot ? déception ? juste un éclair sombre dans votre regard, une minute, pas plus. Ou bien, dépit, presque dans la connotation amoureuse, face au Président, ce François que vous avez appris à connaître, à estimer. Comme diraient nos grands-mères : « ils s’apprécient, tous les deux ! ». Serait-il en train de glisser ? pris, dans les hampes du bateau libéral, et dans la foulée, de lâcher – enfin, de ne plus soutenir aussi fort – ce qui, en vous, lui semblait, il y a peu encore, in-négociable : l’icône de la Gauche au gouvernement. Les sonnailles dans les imaginaires de ce qui s’appelle encore, peuple de Gauche ; celui qui doit croire encore, voter bientôt. Or, vous, vos discours, vos drapeaux… C’est alors qu’on se prend à douter tout d’un coup : cette cordée ; notre Gauche de gouvernement (remarquera-t-on cette insistance au genre gri-gri religieux, avec laquelle on ne cesse de les différencier, celles-là ; la Gauche, sorte de matrice générique et « celle » de gouvernement, forcément aux antipodes ?), qui porte nos tendances, nos rêves et tous nos possibles, cette cordée qui doit grimper – tous – et parvenir là-haut, après moult bivouacs où le chemin, les embûches auront été discutés jusqu’à plus soif. Neige et glace, on le sait, même si le chemin est meilleur ces temps-ci, et la métaphore peut tenir la page entière… cette corde lancée au flanc de la montagne, et, si, sciemment, on en était à envisager de se séparer – moment du film catastrophe, où la musique s’emballe – de ces « vieux membres », trop lourds, un peu inutiles, qu’on traînait, au cas où. Et, puis, ivresse des altitudes ? (on voit presque les yeux des deux Manu se flouter) l’idée vient de l’absolue victoire là, pas loin, d’un Libéralisme (social, mais, chut…) qu’une petite meute de Droite éclairée suffirait au fond à soutenir. Cauchemar de fin de nuit ? Ou légère amertume persistant au réveil… Baste ! nos vœux, pour autant, vont au Président (chef de cordée, insistons) qui sait conduire des deux mains, et, qui, dans l’affaire, sera attentif, et aux chantiers économiques, et au grenier précieux des valeurs. A vous, dame, qui saura ne pas jouer les cartes les plus dures, les va-tout définitifs, qui parviendra à – cela vous arrive – écouter, mesurer, le temps, les impératifs, la place dans le navire commun. Qui ne rejoindra pas le camp facile des simples rouspéteurs, ou des ambitieux. Qui saura avancer les pions sur l’échiquier commun et ne pas nous priver de vos coups de gueule toujours argumentés. Vous êtes encore chez vous, Madame, restez ! (mais tenez fort la corde, quand même !).

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