Faut-il cacher sa judéité ?
Opinion Après l’agression à la machette dont a été victime, le lundi 11 janvier, un professeur juif, à Marseille, au seul motif que sa kippa révélait sa judéité, certains s’interrogent : ne vaudrait-il pas mieux s’abstenir d’afficher si ostensiblement son appartenance au Judaïsme ? Le grand rabbin Haïm Korsia n’est pas de cet avis. Il a encouragé chaque spectateur du match de Coupe de France OM-Montpellier, qui aura lieu à Marseille, le 20 janvier, à couvrir sa tête d’une kippa, en guise de solidarité. Il faut dire que l’antisémitisme, en France, fait rage. Une écrasante majorité des actes racistes, recensés par la CNCDH (Commission nationale consultative des droits de l’homme) sont de nature antisémite : 719 rien que pour les dix premiers mois de 2015, contre – seulement, si l’on peut dire – 400 actes islamophobes, qui ont, eux aussi, explosé. Le résultat ne se fait pas attendre, il s’exprime par le nombre d’alyoth : 7900 pour l’année 2015, 700 de plus qu’en 2014. On assiste ainsi à un véritable exode des Juifs de France vers Israël… Les causes de tout cela ? Elles sont multiples, bien sûr ; mais, en général, on occulte la principale d’entre elles, l’antisionisme virulent qui sévit depuis l’opération contre Gaza. Stade ultime d’une méthodique diabolisation : d’abord la politique de Netanyahou, assimilé à Hitler, puis Israël dans son ensemble, dont la création – une catastrophe, « nakba » – a spolié dès 1948 et continue de spolier les Palestiniens, enfin les communautés juives de par le monde, « collabos » de ce nouveau nazisme. Rien de bien récent toutefois. Déjà, le 10 novembre 1975, la résolution 3379 de l’ONU déclarait que « le sionisme est une forme de racisme et de discrimination ». Et le 21 octobre 2010, se tenait, à la prestigieuse université de Cambridge, un très sérieux colloque sur le thème « Israël, état voyou », organisé par Laurence Booth, la sœur de Tony blair. Mais désormais les choses prennent une dimension jamais vue précédemment. Viviane Teitelbaum, par exemple, députée bruxelloise et échevine de la commune d’Ixelles, se voit assaillie de mails et de tweets du genre « Gaza = Auschwitz », ou encore « Juifs belges = complices et collabos ». Face à une telle offensive, le pire serait de céder. Ôter les kippas reviendrait à faire le jeu des antisémites. D’ailleurs en suivant un pareil raisonnement – inspiré au moins autant par la trouille que par la laïcité – les Chrétiens coptes, en Égypte (spécialement les prêtres, jamais en soutane) devraient raser les murs, pour ne pas « provoquer » les islamistes. Ou même, ici en France, les hommes musulmans devraient ne pas porter le kufi, calot blanc symbole de l’humilité devant Dieu, afin de ne pas susciter l’ire des racistes anti-arabes. Quant à moi, tout goy que je suis, je vais, de ce pas, suivre le conseil du rav Korsia et m’acheter une kippa.