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Le Pontic, Terre de souvenir

Quand je regarde cette image, je vois que la pose était de rigueur, que l’on soit modèle au centre ou témoins sur les côtés, chacun fixe l’objectif avec un peu d’enfance, et de curiosité, ce qui, à l’ère numérique, est une gageure, euh plus habitué aux galures. Au niveau des maisons, il est incroyable de voir le peu de changement, le granite tient la route des dépressions, ces petits gavroches portent presque tous coiffes, bérets ou chapeaux, tête nue, doit montrer d’évidence que l’apparence et l’appartenance à sa condition sociale marquent un clivage, mais aussi de la déférence due à chacun. Sur le plan gauche, qui est cet enfant qui rêve de cap Horn, de gabarre, d’oiseaux migrateurs, de tramontane et de mousson ? Le vent ne nous le dira pas, pas plus que les légendes celtiques ne dévoilent leur charme d’invisibilité, menhir, et dolmen sur la route des calvaires marquent le voyageur, un peu comme l’île de pâques les pas perdus dans la Bretagne, les nés hors imaginent des colosses, des druides, des êtres aux pouvoirs malsains, le « korrigan ». Pour mon père les « korrigans » vivaient sur l’eau puisque c’était le nom d’un de ses bateaux, une petite coque, et un moteur qui permettait d’aller au-delà des linioux, pas d’histoire de vie intérieure dans ma vie. Roger a vu beaucoup, et il a fermé les yeux, je ne connais rien de ses circumnavigations,  « Cousteau » et le « Vercors » sont des mots de ma mère, pas les siens ; parfois il parlait juste, et justice, préférant les Orthodoxes aux religions qui prônent le célibat, en omettant de dire pourquoi rares sont ceux qui évitent les pièges de la libido, isolés, sans ajouter un zest de perversité à leur sexualité de base, nous sommes presque tous sexués, courant électrique alternatif si l’on veut, mais rares sont les prises neutres. Le cours de la rivière de mes maux passés dévie encore l’image, retour à l’image, le temps est si calme et l’atmosphère paisible qu’il annoncerait presque l’orage à suivre ; il s’agit ici du quartier de ma mamie paternelle, le « Pontic », et sa maison au cadran solaire que l’on devine, le pignon à l’ombre de mes soupçons, l’espace d’une fraction de seconde, euh, de minute, les hirondelles ont fui la scène, restent les gens, les jeunes mémoires d’aujourd’hui d’un avenir à construire sur le socle du passé, pas de larme, de nostalgie quand je vois le début du XX° siècle se construire, mais que d’évolution, ici témoignage de l’importance d’une présence sur une photographie, la personne qui cadre encadre la jeunesse d’antan dicte, il sait que l’enfance doit rester immobile et personne ne sort du cadre, pas un mot, ou un seul mot : respect ! Et silence se fait naturellement, sans chamaillerie, sans vouloir prendre la place de l’un ou de l’autre, ce devait être une dimanche, manquent les arbres pour nous donner la direction du vent, et les nuages sourient pour une fois, effet microclimat de cette zone-là, ce bord de mer où mes pas ont coulé !   Jean-François Joubert

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